Chien, cheval, vache, cochon, poule, chat : les animaux domestiques nous accompagnent depuis la préhistoire et sont toujours aussi présents dans notre monde moderne. Cet ouvrage retrace les relations longues et complexes qui nous unissent à ces espèces. On y découvre le lent et difficile processus allant de la capture d’animaux sauvages à leur apprivoisement, puis à un patient mécanisme de sélection.
En effet, l’action humaine modifie profondément le corps et le comportement de ces animaux : rendus plus dociles, plus affectueux, plus robustes ou, au contraire, plus chétifs, ils sont devenus les animaux que l’on connaît aujourd’hui. La finalité de la domestication est claire – elle sert les intérêts des hommes – mais, en retour, son impact sur l’histoire sociale et culturelle est considérable. Loin d’être un phénomène du passé, la majorité des domestications se sont produites durant les dernières décennies.
Ce livre permet de mesurer la diversité des motivations ayant conduit à la mise en élevage d’animaux aussi varié que la drosophile, le saumon ou l’autruche. Il contribue à mieux comprendre les relations complexes, souvent ambiguà« s, que nous entretenons avec ces animaux sans lesquels l’humanité ne serait pas ce qu’elle est.
La domestication est l’une des étapes les plus fascinantes de l’histoire humaine car elle a permis l’émergence de sociétés agricoles complexes, a favorisé un accroissement démographique sans précédent et a contribué à la transformation profonde des écosystèmes au profit de l’espèce humaine.
Ce livre édité chez Delachaux et Niestlé est le dernier ouvrage de Valérie Chansigaud, historienne des sciences et de l’environnement.
« Est qualifié de « domestique  » une espèce, comme le grillon ou la souris domestique, qui partage le logis des êtres humains et non parce qu’il fait l’objet d’une transformation délibérée grà¢ce à une sélection comme le chien ou le poulet, le cochon d’inde ou le ver à soie. Il est domestique car la sélection résulte des conditions offertes par l’habitat humain. Mais le statut d’une espèce s’inscrit aussi dans une histoire fluctuante car aujourd’hui le grillon fait l’objet d’élevages systématiques car il permet de nourrir de nombreux autres animaux insectivores.
Aborder la domestication c’est aussi se poser des questions de nature philosophique telles que :
À partir de quel moment une espèce sauvage exploitée par l’homme devient-elle domestique ?
Quelles différences entre apprivoiser, dompter, dresser, et domestiquer ?
Les animaux de cirque comme les lions ou les éléphants utilisés dans les exploitations forestières sont ils domestiqués ?
Chiens vaches et poules ont ils profité de la domestication ?
Dans un monde façonné par l’homme les êtres vivants sauvages ne deviennent ils pas des animaux domestiques ?
Le chien a été le premier animal domestiqué et le loup gris serait l’ancêtre du chien domestique. 99% de leur ADN est commun.
La domestication des herbivores, pour le lait, la viande et leur force, accompagne l’essor de l’agriculture : les sociétés se sédentarisent et connaissent une forte expansion démographique ce qui a pour conséquence de transformer profondément l’environnement naturel. Un élément remarquable dans la domestication des herbivores notamment les bovidés c’est qu’ils ont donné plus d’une dizaine d’espèces comme la vache, le zébu le yack le buffle d’Asie…
La domestication des oiseaux a d’abord répondu à des nécessités culturelles. Ils ont été domestiqués pour leur beauté, pour servir d’animaux de combat ou pour des sacrifices dans des cérémonies religieuses avant de l’être pour leur viande, œufs ou plumes. La domestication des oiseaux est au service d’usages plus futiles. Les Japonais ont développé une grande variété de lignées décoratives et les poulets commencent à être consommés à partir du XIXe siècle sans doute sous l’influence européenne. Il y a des combats de coq en Asie et en Océanie, en Europe aussi. La consommation de la chair et des œufs ne prend essor en Europe qu’à partir du XVIIIe siècle et au XIXe siècle. L’émergence de l’élevage industriel de poulets durant la seconde moitié du XXe siècle est certainement l‘une des étapes les plus spectaculaires de l‘agriculture contemporaine. Grà¢ce aux innovations techniques allant des hangars aux antibiotiques, la viande de poulet est vendue moins chère que celle vendue par les bouchers.
Le poulet est désormais devenu un bien de consommation, une industrie. La domestication n’est pas qu’un fait du passé. Elle occupe une place essentielle dans l’histoire contemporaine. Le comportement, la morphologie et la physiologie du cochon d’Inde ont été modifiés successivement pour répondre à de multiples usages : producteur de viande, animal de compagnie, outil pour la recherche scientifique.
Les animaux domestiques n’ont jamais été aussi nombreux qu’aujourd’hui !
On sait que plus de 28 milliards de vertébrés sont en élevage dans les fermes (surtout 5 espèces : cochon, chèvre, mouton vache et poulet). C’est donc une fraction de la biodiversité qui a été domestiquée et le poids total des animaux d’élevages surpasse largement celui des espèces sauvages. Des chiffres vertigineux aussi pour l’aquaculture mondiale, les animaux de laboratoire, les invertébrés, les animaux de compagnies comme les chats qui sont passés de 9,76 millions en 2000 à 13,48 millions en 2016 ! Sans oublier les animaux en captivité dans les zoos et les aquariums. Ce déluge de chiffres pour souligner que la vie de chaque être humain dépend de dizaines d’animaux domestiques tant pour sa nourriture que pour ses vêtements, sa santé, son loisir. Et que les cultures ne seraient pas ce quelles sont sans ces bêtes, sans la domestication animale. Mais aujourd’hui des mouvements discordants et des questions éthiques se font entendre allant du refus de toute exploitation de tout animaux à la promotion du végétarisme. Â » V.C.
Écouter Valérie Chansigaud présenter son livre dans la Terre au carré de Mathieu Vidard
– Émission du 4 novembre 2020, 1ère partie
– Émission du 17 novembre, seconde partie